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19 février 2011 6 19 /02 /février /2011 11:35

Certains me disent fée, d'autres me déclament magicienne
d'autres encore me nomment Sybille, fantasmagorie, sirène
ou Sorcière.
Certains me trouvent belle à pâlir, d'autres hideuse à vomir,
mais nul ne me surprend telle que je suis vraiment.
Depuis deux millions et demi d'années je fuis
dans cet univers et dans l'autre au gré de mes envies
J’ai connu des contrées que vous ne pourrez imaginer
valsé lors d'orages féroces et de voraces tempêtes
goûté des soleils incessants et des lunes dévorantes
des tornades d'années englouties en un clignement de cils
Et aujourd'hui dans cette même forêt que jadis
Par gros temps et par printemps
je hume les parfums indomptés de ma bien-aimée contrée
je déambule dans les méandres de ses viscères
je vis de son souffle, de ses sursauts, de ses colères,
je m'abreuve de ses soupirs, je grandis dans sa touffeur,
sans cesse, sans cesse, sans cesse.

Ses amertumes j’ai croqué, léché, mâché, dévoré, recraché
chaque goût je garde dans l’infini de mes papilles ensorcelées.
Mais dans mon grimoire une seule recette il  y a,
l’alchimie parfaite
idéale
absolue
sublime
 
du Coq au Vin.
 

 
Toujours je choisis mon précieux, mon or, mon coq
Dès que sa mère poule est en cloque
A sa couleur sa forme et son odeur
L’œuf me dit sa fermeté et sa saveur
Puis pendant huit jours et huit nuits,
Avant que la lune nouvelle ne s’élève
Laisser le glorieux martyr bien au chaud
Entre un Bordeaux et un Beaujolais nouveau.
A l’éclosion le baptiser d’une goutte de rosé
Et rendre à sa mère caqueteuse le coq à venir
Car tout seul il s’engraissera sans coup frémir.
 
Pendant que votre poulet grandit forcit mûrit

Débute de la recette la meilleure partie :
Pour qu’inoubliable votre coq au vin soit
Ne pas hésiter de boire tu dois
Car se cache la clef du succès
Au fond d’une bouteille de Tariquet.
Tariquet, oui, mais de quelle année ?
 
 
Alors prendre courage je dois
Car je bois je bois et je bois
Je sens mes magiques papilles se réveiller
Et ma tête en rythme vibrer
Surtout ne pas s’arrêter, goûter, aspirer, s’imbiber,
Pour trouver le cru inespéré, celui dont c’est la destinée.
Je cours maintenant après mon poulet
Car il est temps de le découper.
Viens mon Petit mon Ami mon Mari,
Que je te cajole te caresse et te berce
Que je te plume te décortique et te dépèce
 
Les plumes volent les pattes s’agitent
Le sang bout le coup palpite
Mon bras vole la hache s’agite
L’eau bout mon ventre palpite.

Je jette les oignons je jette les épices
Et ma tambouille je touille avec délice
Mais les vins que je goûte depuis tant d’années
Me mettent maintenant au supplice de m’en séparer
Adieu mon bon Bourgogne, adieu mon tendre Castillon,
Au revoir mon fragile Lafitte, hélas mon aimé St Emilion
De vous je me souviendrai toujours
Comme mes premiers, mes seuls, mes vrais amours
 
La marmite tressaute les bulles explosent
Les herbes s’entremêlent le bouillon s’impose
Je danse
En transe
Bientôt se terminera mon errance
Quand je me remplirai enfin la panse
 
VINUS VINUS COQUS
DEUS MALIFICARUM

VINUS VINUS COQUS
MAGICUM BONIFICARUM
 
Viens mon Coq viens mon Maître
Dans ton antre dans mon ventre
Qui par le vin taquiné et excité
Une humanité entière pourrait dévorer

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